WILLY SEILER (1903-1997)
Willy Seiler occupe une place mineure dans le mouvement extrême-orientaliste, n’étant connu que pour la série abondante de gravures sur le Japon de la décennie qui suivit la seconde guerre mondiale et dont les acquéreurs étaient les nombreux américains qui occupaient alors le pays. Il n’en présente pas moins un rare témoignage sur cette période où le peuple nippon, défait, se lance courageusement dans la reconstruction et la modernisation du pays en tentant de préserver son âme et ses traditions.
Né à Dresde en 1903, il fait son apprentissage artistique à Münich puis à Paris et décide à 25 ans de courir le monde. Véritable « globe-trotter », on ne connaît pas la liste complète des pays dans lesquels il a vécu (Europe, Moyen-Orient, les Indes, l’Asie, les Amériques) et où il subsistait grâce à la vente de ses œuvres aux amateurs locaux. Rien n’est connu des œuvres produites pendant cette période. Marié au début des années 1930, son épouse, originaire de Dresde, était aussi une artiste et ils eurent, lors d’un premier séjour au Japon en 1933, une fille Anita qui sera elle-même plus tard une dessinatrice de qualité.
C’est en 1937 que Willy Seiler décide enfin de se « poser » et de s’installer durablement au Japon où il crée une école d’art. Il réussit à se maintenir pendant toute la guerre jusqu’au tournant de mars 1945 où, comme tous les étrangers vivant à Tokyo, il est déporté dans la ville de montagne de Karuizawa, où il retrouve l’artiste français Paul Jacoulet. Comme ce dernier, mais de façon plus marquée, la reprise de sa création artistique à partir de 1946 est rendue possible par la présence des nombreux américains, la plupart militaires, qui occupent alors le pays et apprécient le talent des quelques artistes occidentaux travaillant localement. Grâce à ces débouchés, sa production de gravures devient importante et il complète ses activités en assurant des cours de dessin au sein des troupes américaines. En 1950, il crée même la « Willy Seiler Academy of Fine Arts » à Tokyo.
On a dénombré environ 200 gravures créées par Willy Seiler, la grande majorité ayant pour sujet le « petit peuple » japonais et un nombre restreint de Chinois et de Coréens. Toutes sont sur cuivre, en noir et blanc mais pour certaines, Willy Seiler a également sorti des éditions colorées. Chacune des œuvres était vendue dans son atelier de Karuizawa , numérotée apparemment en fonction des dates de création qui doivent s’étaler sur une dizaine d’années au lendemain de la défaite de 1945, avec une indication du tirage qui varie de 40 à 200 exemplaires.
Excellent graveur, doté d’une sensibilité sociale lui permettant de peindre les milieux populaires avec connivence, on est loin avec lui de l’exotisme ou de l’empire nippon dominateur. C’est un pays en souffrance, vaincu et qui tente de se reconstruire que Willy Seiler peint avec une grande humanité mais aussi un franc réalisme. Ses principaux acheteurs étaient les militaires américains qui retrouvaient dans ses dessins le Japon qu’ils avaient sous les yeux. Paradoxalement, ceci explique peut-être aussi en partie son manque de notoriété au Japon. Après trois décennies passées dans sa patrie d’adoption, Willy Seiler est revenu au milieu des années 1960 en Allemagne et on perd sa trace jusqu’à sa mort présumée en 1997.
Liste des œuvres sur : http://keepingscore.x10.mx/seiler1-20.html