Lilian May Miller, Tokyo Coolie Boy 1920

EXTRÊME-ORIENT,
UN REGARD OCCIDENTAL

Brown Pieter, Jehol Manchuria in winter
M. Keen et M. Lee, Séoul, Corée, 1951

PAUL JACOULET ET LA CORÉE

La relation de Paul Jacoulet avec la Corée est affective comme l’est sa relation avec sa mère, Jeanne. C’est en effet le pays où, dans les années 1930, vit sa mère qu’il aime tant. À la mort de son mari en 1921, laissant Paul seul à Tokyo, Jeanne avait dû rentrer en France. Un jeune japonais, Hiroshi Nakamura, qui était son élève en français, l’avait alors accompagnée. Brillant étudiant, docteur ès sciences à la Sorbonne en 1924, chercheur à l’Institut Pasteur, il épouse Jeanne en 1926. Après qu’il ait été nommé docteur en médecine à l’Université Impériale de Tokyo, Jeanne le rejoint en 1929 et y retrouve son fils chéri. Promu chef du département de médecine de l’université impériale Keijo de Séoul, Hiroshi Nakamura et Jeanne s’installent durablement en Corée.

Paul y fait alors de fréquents voyages: dès Noël 1930, avec son ami de cœur Yujiro Iwasaki, puis quasiment chaque année de la décennie. Lors de ses séjours, il participe peu à la vie mondaine et universitaire que mènent Jeanne et le Docteur Nakamura et préfère observer, avec attention et admiration, les us et coutumes de la population coréenne, riche d’une longue et brillante civilisation, meurtrie par la colonisation japonaise. Ses déplacements dans la péninsule coréenne sont nombreux comme l’attestent ses œuvres souvent localisées avec précision. Il rapporte à chaque fois avec lui un grand nombre de dessins et d’aquarelles dont beaucoup serviront de base plus tard à de magnifiques estampes qui seront exposées à Séoul dès 1936 et où sa notoriété ira croissante jusqu’à nos jours. Il y voit en 1935 Elizabeth Keith alors de passage en Corée mais nous n’avons pas de relation de cette rencontre entre les deux artistes les plus représentatifs du mouvement extrême-orientaliste. Son dernier séjour a lieu en 1940 peu de temps avant le décès de sa mère.

La Corée est également le pays de sa famille d’adoption : en 1931, un jeune Coréen, Jean-Baptiste Rah, devient l’assistant de Paul Jacoulet, qui fera plus tard venir de Corée son jeune frère, Louis. Ils partageront désormais sa vie, « petites mains » journalières pour la réalisation des estampes dont Jacoulet commence la production à rythme élevé en 1934, comme pour la bonne tenue de la maison et de l’atelier, à Tokyo d’abord puis, la guerre venant, à Karuizawa. Les deux frères servent aussi souvent de modèles et Louis Rah sera le compagnon fidèle de Paul jusqu’à sa mort en 1960. Marque ultime d’affection pour cette famille choisie, Paul Jacoulet adoptera officiellement Thérèse, la fille de Jean-Baptiste Rah, en 1951. Elle sera son héritière et fera don de toutes ses œuvres au musée du quai Branly en 2013.

Paul Jacoulet voit le « pays du matin calme » avec émotion et tendresse et les Coréens dont il dresse le portrait, jeunes ou vieux, souvent simples serviteurs ou artisans, sont tous d’une humanité vibrante. Peu d’artistes ont réussi à saisir avec une telle précision à la fois l’âme d’un peuple et les objets et vêtements de sa vie quotidienne, notamment la finesse des chapeaux traditionnels. Malmenés depuis des décennies par deux voisins puissants, la Chine et le Japon, les Coréens portent alors en eux les marques d’une Histoire tragique et la tristesse d’une indépendance perdue. Mais ils affichent également la fierté d’une riche culture et de coutumes ancestrales que le trait et les couleurs de Jacoulet offrent à la postérité.

La collection

Bébé coréen en costume de cérémonie, Séoul, septembre 1934. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date du 5 janvier 1931 lors du premier séjour de Jacoulet en Corée et porte la mention : « un bébé coréen en robe d’apparat, enfant de haute classe ». En fait, le modèle était l’enfant d’un domestique de sa mère à laquelle Paul Jacoulet rendait visite pour les fêtes de fin d’année).
Bébé coréen en costume de cérémonie, Séoul, septembre 1934. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date du 5 janvier 1931 lors du premier séjour de Jacoulet en Corée et porte la mention : « un bébé coréen en robe d’apparat, enfant de haute classe ». En fait, le modèle était l’enfant d’un domestique de sa mère à laquelle Paul Jacoulet rendait visite pour les fêtes de fin d’année).
Trois coréens, Séoul, Corée, août 1935. Coll. J.D.
Trois coréens, Séoul, Corée, août 1935. Coll. J.D.
Marchand de sel, Corée, février 1936. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale datée de l’automne 1932 a été faite lors du second voyage de Jacoulet en Corée. Le modèle est un vieux serviteur de la mère de Jacoulet que ce dernier amènera avec lui à Tokyo où il mourra de nombreuses années plus tard. On le retrouve dans plusieurs estampes : Hokkan-Zan (1937), Les vieux manuscrits (1948), Longévité (1948), Le banni (1957)).
Marchand de sel, Corée, février 1936. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale datée de l’automne 1932 a été faite lors du second voyage de Jacoulet en Corée. Le modèle est un vieux serviteur de la mère de Jacoulet que ce dernier amènera avec lui à Tokyo où il mourra de nombreuses années plus tard. On le retrouve dans plusieurs estampes : Hokkan-Zan (1937), Les vieux manuscrits (1948), Longévité (1948), Le banni (1957)).
La chenille verte, Corée, novembre 1936. Coll. J.D. (Le modèle est le même que dans Le retour d’un banquet (1951)).
La chenille verte, Corée, novembre 1936. Coll. J.D. (Le modèle est le même que dans Le retour d’un banquet (1951)).
Hokkan-Zan, Séoul, Corée, décembre 1937. Coll. J.D. (Les Monts Bukhan sont au nord de Séoul. Même modèle que celui du Marchand de sel, février 1936).
Hokkan-Zan, Séoul, Corée, décembre 1937. Coll. J.D. (Les Monts Bukhan sont au nord de Séoul. Même modèle que celui du Marchand de sel, février 1936).
La lettre du fils, Séoul, Corée, juin 1938. Coll. J.D. (Les premiers tirages ont pour titre La demande d’argent).
La lettre du fils, Séoul, Corée, juin 1938. Coll. J.D. (Les premiers tirages ont pour titre La demande d’argent).
Le repas des mendiants, Séoul, Corée, octobre 1938. Coll. J.D. (À rapprocher de l’estampe de 1935, Trois coréens).
Le repas des mendiants, Séoul, Corée, octobre 1938. Coll. J.D. (À rapprocher de l’estampe de 1935, Trois coréens).
Nuit de neige, Corée, juin 1939. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1934 lors du quatrième séjour de Jacoulet en Corée).
Nuit de neige, Corée, juin 1939. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1934 lors du quatrième séjour de Jacoulet en Corée).
Les pastèques, Johoku-Ri, Corée, septembre 1939. Coll. J.D. (Les deux modèles se retrouvent dans M. Keen et M. Lee de 1951. Johoku-Ri est un lieu près de Wusan, sur la côte Est de la Corée du Nord).
Les pastèques, Johoku-Ri, Corée, septembre 1939. Coll. J.D. (Les deux modèles se retrouvent dans M. Keen et M. Lee de 1951. Johoku-Ri est un lieu près de Wusan, sur la côte Est de la Corée du Nord).
Le trésor, Corée, mai 1940. Coll. J.D.
Le trésor, Corée, mai 1940. Coll. J.D.
Le Maître potier, Corée, septembre 1940. Coll. J.D.
Le Maître potier, Corée, septembre 1940. Coll. J.D.
Bergers des hautes montagnes, Corée, avril 1941. Coll. J.D.
Bergers des hautes montagnes, Corée, avril 1941. Coll. J.D.
Le nid, Corée, 1941. (Cette estampe était destinée à la mère de Paul Jacoulet mais elle mourra avant qu’elle soit terminée). Coll. J.D.
Le nid, Corée, 1941. (Cette estampe était destinée à la mère de Paul Jacoulet mais elle mourra avant qu’elle soit terminée). Coll. J.D.
Dans les jardins réservés du Palais, Séoul, Corée, octobre 1947. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1942 mais Jacoulet doit alors cesser la réalisation d’estampes pour plusieurs années à cause de la guerre. Il n’en continue pas moins à réaliser des aquarelles de 1942 à 1944 tant qu’il est à Tokyo et certaines deviendront des estampes à partir de 1947).
Dans les jardins réservés du Palais, Séoul, Corée, octobre 1947. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1942 mais Jacoulet doit alors cesser la réalisation d’estampes pour plusieurs années à cause de la guerre. Il n’en continue pas moins à réaliser des aquarelles de 1942 à 1944 tant qu’il est à Tokyo et certaines deviendront des estampes à partir de 1947).
La mariée, Séoul, Corée, février 1948. Coll. J.D. (Aquarelle initiale de 1942).
La mariée, Séoul, Corée, février 1948. Coll. J.D. (Aquarelle initiale de 1942).
Le bonze errant, Corée, août 1948. Coll. J.D. (Aquarelle initiale de 1942).
Le bonze errant, Corée, août 1948. Coll. J.D. (Aquarelle initiale de 1942).
Tempête du cœur, Séoul, Corée, août 1948. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1942 et précise : « jeune Coréenne moderne rêveuse ». le modèle est aussi celui de La mariée des mêmes années).
Tempête du cœur, Séoul, Corée, août 1948. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1942 et précise : « jeune Coréenne moderne rêveuse ». le modèle est aussi celui de La mariée des mêmes années).
Le fils qui vient de perdre son père, Corée-Séoul, octobre 1948. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1940 ; à rapprocher de La lettre du fils de 1938).
Le fils qui vient de perdre son père, Corée-Séoul, octobre 1948. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1940 ; à rapprocher de La lettre du fils de 1938).
Les vieux manuscrits, Corée-Séoul, novembre 1948. Coll. J.D. ( Aquarelle initiale de 1941).
Les vieux manuscrits, Corée-Séoul, novembre 1948. Coll. J.D. ( Aquarelle initiale de 1941).
Longévité, Corée-Moppo, novembre 1948. Coll. J.D. (Moppo – Mokpo – est une ville au sud-ouest de la péninsule coréenne. L’aquarelle initiale de 1942 précise « Montagnes du diamant»).
Longévité, Corée-Moppo, novembre 1948. Coll. J.D. (Moppo – Mokpo – est une ville au sud-ouest de la péninsule coréenne. L’aquarelle initiale de 1942 précise « Montagnes du diamant»).
Le marié, Séoul, Corée, novembre 1950. Coll. J.D. (Ne constitue pas un dyptique avec La mariée datée de 1948. Les deux aquarelles initiales datent de 1942).
Le marié, Séoul, Corée, novembre 1950. Coll. J.D. (Ne constitue pas un dyptique avec La mariée datée de 1948. Les deux aquarelles initiales datent de 1942).
Les deux adversaires, Corée, décembre 1950. Coll. J.D. (Jacoulet crée ces deux estampes comme un dyptique quelques mois après le déclenchement de la guerre de Corée, avec sans doute l’intention de le vendre à son public américain. A notter cependant que les deux aquarelles initiales avaient été réalisées en 1942 pour illustrer les combats de coqs, pratique courante en Corée).
Les deux adversaires, Corée, décembre 1950. Coll. J.D. (Jacoulet crée ces deux estampes comme un dyptique quelques mois après le déclenchement de la guerre de Corée, avec sans doute l’intention de le vendre à son public américain. À noter cependant que les deux aquarelles initiales avaient été réalisées en 1942 pour illustrer les combats de coqs, pratique courante en Corée.)
M. Keen et M. Lee, Séoul, février 1951. Coll. J.D. (Les deux modèles, amis de la famille Jacoulet, figurent dans plusieurs autres estampes).
M. Keen et M. Lee, Séoul, février 1951. Coll. J.D. (Les deux modèles, amis de la famille Jacoulet, figurent dans plusieurs autres estampes).
Retour d’un banquet, Corée, Séoul, décembre 1951. Coll. J.D.
Retour d’un banquet, Corée, Séoul, décembre 1951. Coll. J.D.
Le génie sans nom, Corée, janvier 1953. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1944. On peut y voir un hommage à ses graveurs).
Le génie sans nom, Corée, janvier 1953. Coll. J.D. (L’aquarelle initiale date de 1944. On peut y voir un hommage à ses graveurs).
Vent du Nord, Corée, juillet 1953. Coll. J.D.
Vent du Nord, Corée, juillet 1953. Coll. J.D.
Les bons piments rouges, Johokuri, Corée, 1954. (Même lieu que Les pastèques de 1939). Coll. J.D.
Les bons piments rouges, Johokuri, Corée, 1954. (Même lieu que Les pastèques de 1939). Coll. J.D.
Le pâtissier, Corée, mars 1954. Coll. J.D. (Fait partie d’une série imaginée par Jacoulet mais inachevée avec Le marchand de sel de 1936, Le maître potier de 1940 et La blanchisseuse de 1955).
Le pâtissier, Corée, mars 1954. Coll. J.D. (Fait partie d’une série imaginée par Jacoulet mais inachevée avec Le marchand de sel de 1936, Le maître potier de 1940 et La blanchisseuse de 1955).
La blanchisseuse, Corée, avril 1955. Coll. J.D.
La blanchisseuse, Corée, avril 1955. Coll. J.D.
Flocons de neige, Pyongyang, Corée, avril 1956. Coll. J.D. (le trio féminin, thème classique de l’estampe japonaise qu’on retrouve notamment dans Le chant des fileuses, Mongolie de 1958, dans Les fleurs d’hiver, Japon de 1955 ou dans Retour de la jungle, Célèbes de 1948).
Flocons de neige, Pyongyang, Corée, avril 1956. Coll. J.D. (le trio féminin, thème classique de l’estampe japonaise qu’on retrouve notamment dans Le chant des fileuses, Mongolie de 1958, dans Les fleurs d’hiver, Japon de 1955 ou dans Retour de la jungle, Célèbes de 1948).
Le banni, Sud Corée, mars 1957. Coll. J.D.
Le banni, Sud Corée, mars 1957. Coll. J.D.
Les petits voleurs, Johokuri, Corée, 1959. (Fait partie d’un dyptique dont manque ici la partie gauche). Coll. J.D.
Les petits voleurs, Johokuri, Corée, 1959. (Fait partie d’un dyptique dont manque ici la partie gauche). Coll. J.D.
La danseuse coréenne, Corée, Séoul, janvier 1960. Coll. J.D. (L’aquarelle originale datait de 1935 ! Jacoulet réalise cette estampe 25 ans plus tard, en janvier 1960, trois mois avant sa mort).
La danseuse coréenne, Corée, Séoul, janvier 1960. Coll. J.D. (L’aquarelle originale datait de 1935 ! Jacoulet réalise cette estampe 25 ans plus tard, en janvier 1960, trois mois avant sa mort).