ANNA MARY HOTCHKIS (1885-1984)
Anna Mary Hotchkis est écossaise comme Elizabeth Keith et elle représente toutes deux la vitalité et l’originalité de l’école de peinture écossaise du début du XXe siècle et notamment de la gent féminine.
Elle est née en 1885 près de Glasgow dans une famille de neuf enfants dont les quatre sœurs resteront très liées (l’une d’elle, Isobel, se fera aussi connaître comme peintre). Sa formation initiale a lieu à la Glasgow School of Arts puis à l’Edinburgh College of Arts sous la direction du peintre Robert Burns (1869-1941) et enfin à Munich. Elle choisit de vivre pendant une dizaine d’années dans le petit village de Kirkcudbright, sur la côte sud-ouest de l’Ecosse, déjà à l’époque le village d’artistes peintres écossais qu’il sera pendant tout le XXe siècle et auquel elle restera fidèle toute sa vie.
Sa vie connaît un tournant en 1922 quand elle décide de rendre visite à sa sœur Catherine qui a choisi d’être institutrice pour la YWCA en Mandchourie, à Mukden (actuelle Shenyang). Démontrant déjà un attrait pour les voyages, elle n’hésite pas, avant de la rejoindre, de faire de longues escales aux États-Unis, au Japon et en Corée et, depuis Mukden, de visiter plusieurs régions chinoises dont Shanghai et Pékin où elle passe finalement un an à enseigner l’art à l’Université d’inspiration chrétienne Yenching dont John Leighton Stuart (1876-1962) vient d’être nommé Président (il sera l’ambassadeur américain de 1946 à 1949).
Elle est de retour en Écosse en 1924, après de longues étapes à Moscou et à Berlin, et organise en 1925 sa première exposition à Londres où apparaissent 70 toiles qu’elle a ramenées de son séjour en Chine. La nostalgie la ramène à Pékin en 1926. Elle y passe une dizaine d’années jusqu’au déclenchement de la guerre avec le Japon en 1937, période entrecoupée de plusieurs allers-retours au Royaume-Uni pour y maintenir la reconnaissance de son art.
Lors de son premier séjour à Pékin en 1924, elle rencontre une artiste américaine, Mary Mullikin, et se découvrant de nombreuses affinités, elles vont entretenir toutes deux une fidèle amitié (voir sur ce site le chapitre consacré à Mary Augusta Mullikin) renforcée par une envie commune de parcourir la Chine. Il convient de souligner que la Chine de cette période (1927-1937) est en proie à des convulsions répétées entre seigneurs de la guerre ou entre les partis nationaliste et communiste, qui se cumulent avec un brigandage récurrent, et les noms de Mesdames Hotchkis et Mullikin s’ajoutent à ceux d’autres femmes intrépides de cette époque comme Léa Lafugie ou Alexandra David-Néel. Comme chez elles, ces voyages ont été la source de leur inspiration et la matière des tableaux et des écrits qu’elles ont créés avec intelligence et sensibilité.
Après un premier voyage en Corée et au Japon en 1927, les deux femmes montent en 1931 à deux reprises des expéditions au nord de la province du Shanxi pour atteindre, près de Datong, les célèbres grottes de Yungang, l’un des sites bouddhiques les plus renommés de Chine. De ces voyages nait le livre Buddhist Sculptures at the Yun Kang Caves paru en 1935 chez l’éditeur français de Pékin, Henri Vetch. Ce dernier conquis par les travaux et les peintures des deux artistes les encourage alors à poursuivre dans la même veine en visitant les autres sites sacrés de Chine. Anna Hotchkis et Mary Mullikin se rendent ainsi fin 1934 au Mont Taï (Taï Shan), le Mont de l’Est, le plus ancien lieu de dévotions taoïste dans la province du Shandong ; à l’automne 1935, elles visitent trois autres sites : dans le Shanxi, le Mont Bouddhique des Wutai Shan et le Mont Heng ; et beaucoup plus à l’Ouest, dans le Shaanxi, le Mont Hua. L’année suivante, elles complètent ces pèlerinages en visitant le Song Shan dans le Henan puis le Heng Shan dans le Hunan et enfin dans le lointain Sichuan, les prestigieux temples bouddhiques du Mont Emei (Emei Shan). Dans les mois qui suivirent, les deux voyageuses entreprennent de rédiger le récit de leurs nouvelles découvertes mais le déclenchement de la guerre Sino-Japonaise ne leur permet pas de le faire publier.
Si Mary Mullikin décide de rester à Tianjin, Anna Hotchkis préfère rentrer en Angleterre mais en prenant une fois encore le « chemin des écoliers », séjournant au Japon, à Hong Kong, à Ceylan, en Inde, en Irak, à Constantinople, en Grèce, à Venise avant de retourner en Écosse « plein d’usage et raison » vivre à Kirkcudbright « le reste de son âge ». Elle continue à peindre mais s’échappe encore régulièrement pour de nouveaux voyages en Europe et aux Etats-Unis et elle retournera même à Hong Kong en 1973 pour la sortie, enfin, du livre qu’elle avait écrit auparavant avec Mary Mullikin, The Nine Sacred Mountains of China, chez le même éditeur Vetch, 38 ans après le périple qu’elles avaient fait ensemble.
Bibliographie :
- Buddhist Sculptures at the Yun Kang caves, by Anna Hotchkis and Mary Mullikin, Henri Vetch, Pékin, 1935
- The Nine Sacred Mountains of China, by Anna Hotchkis and Mary Mullikin, Vetch & Lee, Hong Kong, 1973